TREE
ON THE EDGE OF THE FOREST
text by Olivier Bourgoin
With Franck Landron, we are travelling on the edge in two respects. We are at the confines of photography but also on the fringes of painting and engraving. The limits are tenuous. His trees germinate and grow in this shifting environment to create his own forest. A giant herbarium for a sorcerer’s apprentice. He invites us to lose ourselves in the tangle of the brambles, twigs, and bushes. He bids us to join him in meditation under the palm trees, to the sounds of rustling leaves and creaking branches. He incites us to lean our backs against the protective tree barks, to feel their rub, and pit ourselves against their tranquil force. “Tree” is a sensory journey to a new pictorial land. In symbiosis with his subject at the heart of the woods which Franck Landron explores with his camera and his memory, his works have the same appearance as their living, organic, and self-sufficient subjects. The temptation to touch is great: his trees take shape and spring to life on a great variety of mediums, and are subjected to the most unexpected treatments. In the different countries he has visited, he has collected many trees, a great variety of common or precious, frail or robust, deciduous or evergreen essences. In the manner of a botanist, he amasses the different species and methodically records them photographically, thus creating a first album solely composed of photographs. He ‘takes” the photograph. Then he “makes” the photograph. By plunging into the heart of the material, he seeks to find in each print the true nature of the tree, its bark, its foliage, but also the traces of its decline and decay brought about by the elements and the seasons. Franck Landron often privileges views of the trees in winter, closely observing their skeletons and their ghostly geometric nudity. He also plays with shifting between sharp and blurred focusing, often in the same picture and sometimes by superimposing images. The plant matter is then revealed in its vibrancy, movement, and friction with time. He does not seek to represent the tree in reality, but in its primary reality. His photographs are printed on a great variety of papers and supports, picked up in the course of his travels, which include paper encrusted with flowers or shards of wood; but there are also prints directly made on bark, canvas, cloth, etc. The contours of these supports infuse these photographs with a sensuality which alternates between smoothness and thorniness. All manner of manipulation is used in creating as sensitive or as tangible a construction as possible, every device or technique is called on to express the very substance of the tree. These include digital processing and the adjunction of pigments and materials to the photochemical print. Franck Landron, like an alchemist blends these materials, experimenting with the prints to obtain the desired result, adding varnish or resin to them, burning them, or scratching their surfaces. Like the tops of the trees in the forest, his works are never flat and relief plays a special role. He considers all his techniques as an extension of different possibilities, as a creative plus, like the painter’s palette and brushes which enable him to use a wide range of colours and textures. His work with trees is also a pretext, an experimental field, and a means enabling him to reconnect with the roots of photography and its hidden component, by extracting the graph from photograph. By not treating them in a naturalistic manner and at times by even extracting them from their immediate environment, isolating them, and cutting out a space around them, Franck Landron transforms his trees into individual personalities of varying sizes and changing moods. We are then free to see them as legendary heroes, at times menacing, at others reassuring. We return to childhood imagining ourselves lost, inventing extraordinary adventures in a magical land. We em7 bark on an initiatory and introspective journey, where the tree is a part of the symbolism of the forest, harbouring our ancestral fears and fantasies. Franck Landron is our guide in this dense composite universe; he lifts the foliage and pushes aside the branches. He invites us to penetrate the edge of the forest.
À L’ORÉE
TEXTE Olivier Bourgoin
Avec Franck Landron, nous voyageons en lisière. Doublement.
Nous sommes aux frontières de la photographie, mais toujours en marge de la peinture ou de la gravure. La limite est ténue. Sur ce territoire mouvant naissent et s épanouissent les arbres qui peuplent sa forêt.
Un herbier géant pour un apprenti sorcier.
Il nous invite à nous perdre avec lui dans les entrelacs de ronces, de brindilles, de buissons. Il nous convie
à méditer sous les palmes, dans le bruissement des feuilles, le grincement des branches. Il nous incite à nous adosser aux écorces protectrices, à nous frotter à leur rugosité, à nous mesurer à leur force sereine. Tree est un périple sensoriel vers une nouvelle contrée picturale. En osmose avec son sujet, au cœur des bois qu il a explorés avec son objectif et sa mémoire, les œuvres de Franck Landron semblent, comme leurs sujets, vivantes, organiques, autonomes. La tentation du toucher est grande : ses arbres prennent forme et vie sur les supports les plus divers, subissent les interventions les plus inattendues.
Au grè des pays visités, il collecte quantité d arbres,
d essences communes ou précieuses, de structures frêles ou robustes, à feuilles caduques ou persistantes. À la manière d un botaniste, il amasse les différentes espèces, les enregistre photographiquement de manière méthodique. Il constitue alors un premier album de photographies. Uniquement de photographies.
Il prend la photographie. Puis il fait la photographie.
En plongeant au cœur de la matière, sa volonté est
de retrouver dans chaque tirage la véracité de l arbre, son écorce, son feuillage, mais aussi le vieillissement
et la déchéance qu éléments et saisons lui impriment. Franck Landron privilégie souvent une vision hivernale des frondaisons, s attachant particulièrement aux squelettes des arbres, à leur nudité géométrique et fantomatique.
Il joue également avec le flou et le net, souvent sur
la même image, parfois en accumulant les images. La matérialité végétale est alors révélée dans sa vibration, dans son mouvement, dans sa friction au temps.
Il ne cherche pas à représenter l arbre dans la réalité, mais dans sa vérité première.
Ses images sont elles-mêmes tirées sur les papiers et les supports les plus divers, glanés au rythme de ses voyages : papiers incrustés de fleurs, d éclats de bois, mais également imprimés à même l écorce, la toile,
le tissu, etc. Le modelé de ces supports baigne les photographies d une sensualité douce ou piquante. Toutes les manipulations sont invitées à la construction la plus sensible, la plus tangible. Tous les artifices et toutes les techniques sont convoqués pour retrouver
la substance même de l arbre : de la torsion numérique à l adjonction de pigments ou matériaux se superposant au tirage argentique.
Franck Landron malaxe cette matière en alchimiste,
l éprouve physiquement pour obtenir le rendu souhaité, ajoutant vernis ou résine, brûlant, rayant les surfaces. Telle la cime des forêts, ses œuvres ne sont jamais planes. Le relief y tient aussi une place particulière.
Il envisage toutes ses techniques comme une extension de possibilités, un plus à la créativité, la palette offrant au peintre de travailler simultanément avec une large gamme de couleurs ou de pinceaux.
Son travail sur l arbre est également un prétexte, un terrain de jeu, un biais lui permettant de retrouver
les racines de la photographie, sa partie enfouie. Extraire la graphie de la photographie.
Loin de tout naturalisme, en les soustrayant parfois
à leur environnement immédiat, en les isolant, en les détourant de vide, les arbres de Landron deviennent
de véritables personnages, de tailles variables et
d humeurs changeantes.
Nous pouvons alors à loisir les interpréter en héros de contes et légendes, parfois menaçants, parfois rassurants. Nous redevenons des enfants qui s imaginent perdus,
s inventant des aventures extraordinaires dans un pays magique. Nous nous engageons dans un parcours initiatique et introspectif, où l arbre participe de la symbolique de la forêt, réceptacle de nos peurs ancestrales et des nos fantasmes.
Franck Landron est le guide vers cet univers composite et dense, celui qui soulève les ramages, écarte les branchages. Il nous invite à pénétrer par-delà l orée.